vendredi 11 juillet 2014

Chapitre Londonien - Episode 1

Après avoir pris une semaine loin de New-York pour que Washburne puisse organiser les obsèques et l'enterrement de son ami Julius Homer, que O'Connor puisse récupérer de sa malheureuse expérience en allant rendre visite à sa famille pour se changer les idées, ensemble ils règlent les détails pour leur voyage et annoncer leur départ pour Londres à leurs alliés, ainsi ils apprennent de Jonah Kensington, qui tient toujours à les soutenir dans leur périple avec ses maigres finances, qu'il connaît deux contacts d'Élias à Londres qui pourrait leur êtres utiles, Mickey Mahoney le rédacteur du Scoop un tabloïd hebdomadaire et l'inspecteur James Barrington de Scotland Yard. Ces deux noms en poche et l'aide promise par Erica Carlyle quelques jours auparavant, les investigateurs, avec qui se comptent à présent le journaliste Ichabod Crane du Pillar-Report, se sentent à nouveau gonflés à bloc pour continuer leur périlleuse enquête.


En route pour l'Angleterre!

Les investigateurs s'embarquent le 27 Janvier 1925 à bord de l'Aquitania de la compagnie britannique Cunard Line pour un voyage de quatre jours en direction de Liverpool, avant de prendre le train pour Londres. Washburne qui a les moyens et en grand prince, offre le voyage en première classe à ses compagnons, ainsi ils profiteront du confort luxueux qu'offre le paquebot et un vrai repos durant la traversée, même si chacun d'eux envisagent de tromper leur ennui dans les livres étranges qu'ils ont emmenés avec eux, ce voyage sera t-il alors de tout repos ??




Ho! Mon Bateau!! ho ho ho!!!
Les premiers jour de la traversée les investigateurs profitent des activités et des services de la compagnie: parties de croquet sur le pont balayé par les vents, parties de cartes au chaud dans le grand salon, spectacle de magie et de musique en soirée, l'éblouissante restauration, etc... O'Connor découvre les trésors du bar loin des restriction de la prohibition, Crane flâne sur le pont emmitouflé dans son manteau essayant de profiter d'un soleil timide et Washburne fait connaissance avec les gens du monde autour de la table du capitaine. Mais au fil des jours la lecture des livres va ternir un peu ce beau tableau, les pages jaunies à l'odeur âcre révèlent des horreurs abominables et atroces à la psyché des investigateurs qui finiront par avoir raison de leur optimisme et les tenir fébrilement enfermés dans leur cabines. Un soir, Washburne après avoir réussi à s'extirper de sa lecture morbide, décide de réunir tous le monde pour un apéritif libérateur en prenant l'air sur le pont. Chaudement vêtus assis autour d'une table basse, il discutent mollement les doigts crispés à leurs verres comme s'il s'agissait d'une bouée de sauvetage, la discussion dérive très vite autour de ce que chacun a étudié dans sa cabine et bientôt, à tour de rôle, chacun expose sa désagréable expérience littéraire.

Crane commence alors en racontant ce qu'il est en train de lire, "Le Peuple du Monolithe" un recueil de poèmes d’un poète américain du nom de Justin Geoffrey. À travers ses poèmes, Geoffrey y dépeint une série de voyage en des terres indéterminées, où il évoque une nature sauvage que le journaliste classe quelque part entre le Gothique et le Romantisme, pourtant Crane a ressentit à sa lecture qu'il émane entre ces vers une sensation de malaise qu'il a du mal à définir. Ce retour à la nature n’est pas une régénération spirituelle chez Justin Geoffrey, poursuit Crane en fixant l'océan au-de là de la balustrade, mais au contraire un retour vers un état dégénéré où la conscience se dilue et finit par être anéantie face au caractère vertigineux et insondable de l’Immuable et de l’Éternel. Les paysages de Geoffrey suggèrent une morne stérilité, une immobilité morbide dissimulant d’antiques secrets inavouables, et laissent entrevoir en filigrane une vision nihiliste d’un cosmos tout entier voué à l’entropie et dénué de grâce divine... Pour terminer son étrange raisonnement Crane, toujours le regard perdu dans les vagues noires, cite presque instinctivement quelques vers qu'il a retenu:


« Des êtres des temps anciens guettent encore, il paraît,
Dans le vide et les coins oubliés de ce monde,
Et toujours et encore des portails restent ouverts certaines nuits
La couvée des Enfers.»


Un silence glacé s'installe, le pont est presque désert, O'Connor semble nerveux et gigote sur son fauteuil en avalant d'un trait son verre de scotch avant de copieusement se resservir.
Il s'éclaircit la voix, tousse et raconte ce que lui a lu.

Ce manuscrit est le journal de Montgomery Crompton, un artiste anglais d'après ce qu'a comprit le détective. Le journal décrit ses pérégrinations en Égypte en 1805 alors qu'il est à la recherche de l'inspiration mais surtout oublier son expérience à la guerre qui semble l'avoir traumatisé. Passablement opiomane et dérangé, il s’épanche en décrivant dans un style grandiloquent ses nuits de débauche, ses errances au pied des antiques pyramides ou dans les dédales de la vieille ville du Caire. Crompton s’abreuve des légendes d’antan et est frappé par une figure antique le Pharaon Noir, un mystérieux personnage au vaste savoir occulte – O'Connor sort un papier chiffonné de sa veste où il a noté cette information – venu de l’antique Irem, la Cité des Piliers, perdue dans les sables du désert. O'Connor remplit à nouveau son verre et poursuit en s'épongeant le front. De là il explore fiévreusement les ruines de l’Égypte antique, étudiant les fresques hiéroglyphiques et les visages hiératiques des souverains de jadis à la recherche de signes. Il entend des rumeurs évoquant l’existence d’une société secrète initiatique, la Confrérie du Pharaon Noir, ayant pour symbole une ankh inversée et perpétuant les enseignements mystiques de l’énigmatique figure en œuvrant à son retour. S’abîmant dans les rêveries du haschisch, Crompton finit par se persuader d’être la réincarnation du Pharaon Noir, dévolu à un destin divin. Il s’épuise à en chercher la trace et devient de plus en plus incohérent, à mesure qu’il se consume dans sa quête, sombrant peu à peu dans la folie.

Au final, en déduit O'Connor, il devient très difficile de démêler fantasmes et réalité dans le journal, Crompton étant en proie à un délire permanent, ne sachant plus lui-même si les meurtres qu’il se voit accomplir, plantant son gourdin hérissé d’une pointe dans le cœur de victimes hurlantes, les cryptes étranges à la ténébreuse beauté et les gardiens inhumains devant lesquels il se prosterne sont réels ou seulement les échos des songes ténébreux qui ne cessent de le hanter. Le détective dit que le journal est inachevé, que Montgomery Crompton perd définitivement la raison dans ses divagations messianiques, pour terminer son récit en estimant devoir désormais aller répandre la parole du Pharaon Noir en Angleterre…


O'connor se sent vidé, presque en transe après cet exposé qu'il n'a pas aimé raconter, des sueurs froides le font frémir, tandis que Crane le regarde d'un air sombre.

Washburne enchaîne alors et raconte à son tour ce qu'il étudie, Les Sectes Secrètes d'Afrique qu'ils ont découverts dans la boutique Ju-Ju à Harlem, avec une pointe de désarroi en jetant des coups d’œil à O'Connor, il explique que c'est une monographie d'un anthropologue et explorateur britannique du nom de Nigel Blackwel. Il y décrit ses voyages, en Afrique Noire entre 1903 à 1915 et y détaille diverses religions, croyances et coutumes folkloriques avant d’aborder des cultes obscurs du Continent Noir. De là, explique Washburne, Blackwell spécule sur l’origine possible de ces nombreuses sectes atypiques, certaines apparemment très anciennes, dont bon nombre pourraient être nées en Afrique du Nord, notamment en Égypte. Au fil de ses sinistres pages, continue t-il, de nombreuses sectes y sont décrites avec leur histoire sordide et leurs pratiques étranges, le tout abondamment illustré de nombreuses gravures ignobles d’objets rituels, de pratiques répugnantes telles que des auto-mutilations associées à de l’auto-cannibalisme, des sacrifices d'animaux et d'humains et même de l'anthropophagie rituelle et pratiques nécrophiles. Washburne souligne en dévisageant gravement ses compagnons, que l'anthropologue fait aussi mention d’une secte sanguinaire, le Culte de la Langue Sanglante, dont l’épicentre serait un lieu nommé Montagne du Vent Noir, dans l’intérieur du Kenya, et qui vénérerait une entité nommée le Hurleur dans les Ténèbres. Celui-ci est représenté avec une sorte de tentacule sanguinolent hideux en guise de tête, son souffle est le Vent Noir apportant sécheresse et épidémies, il envoit les ténèbres ailées semer la mort dans les tribus ennemies de ses adorateurs. Ce culte comporte des aspects messianiques et eschatologiques, annonçant que leur leur dieu s’incarnerait un jour prochain dans la chair, annonçant ainsi la Fin des Temps.

O'Connor sue maintenant à grosses gouttes alors qu'il sent son cœur s'emballer, la discussion prend des tournures qui ne lui plaît plus et il a envie de retourner dans sa cabine, un vent de panique s'empare de lui, il se lève subitement et une bile acide lui remonte dans la gorge, il étouffe et tombe à la renverse pendant que ses compagnons se lèvent surpris par cette réaction et tentent de le retenir. La soirée se termine lorsque O'Connor dort dans sa cabine après qu'un docteur fut appelé, Washburne et Crane secoués, regagnent aussi leurs appartements une fois le calme revenu.

Capitaine nous avons un problème...
Deux jours après ce petit incident et qu'il aient appris que leur voyage prendraient du retard dû à la mauvaise météo qui s'annonce pour les prochains jours, les investigateurs n'ont plus vraiment goût aux festivités du bord et passent le plus clair de leur temps dans leur cabine.

Un soir Washburne, alors qu'il est penché une nouvelle fois sur des passages un peu cryptique de Sectes Secrètes d'Afrique, sa concentration est distraite par un bruit dans son dos, il se retourne après avoir délicatement refermé son livre et aperçoit la porte de sa cabine entre-ouverte, il se fige sur sa chaise un instant et se dit intérieurement que son colt 45. est rangé au fond de sa malle dans la penderie, avec précaution il se lève et se dirige vers la porte prêt a toutes éventualités, il ouvre la porte vigilant et jette un œil dans le couloir, personne. Il entend alors comme un sifflement dans son dos, Washburne se retourne vivement et retire la couverture de son lit après avoir aperçut une forme sombre se glisser dessous, un serpent!! un serpent noir et luisant, avec une tête rouge dressée les crocs en avant, Washburne fait un bond en arrière au moment où le reptile crache agressivement dans sa direction, ne sachant quoi trop faire devant cette menace sans doute venimeuse, il bat en retraite hors de la cabine et appelle au secours, et en un rien de temps rameute des marins armés de gourdins et d'un fusil pour tenter de se débarrasser du serpent couleur ébène et sang – entre-temps le vacarme provoque un petit rassemblement qui oblige le capitaine à intervenir – il leur faut une bonne vingtaine de minutes pour coincer le serpent, qui sera finalement abattu à coups de crosses rageuses par l'un des marins. 

Pendant ce temps dans le calme relatif de la cabine de O'Connor, enfermé là depuis son coup de stress de l'autre soir, un cauchemar effroyable le fait sortir péniblement de son sommeil, reprenant difficilement ses esprits, son bras heurte avec douleur les cadavres de bouteilles posés avec négligence sur la table de nuit, en tombant elles heurtent d'un son étouffé la moquette de la chambre, O'Connor entend alors comme des voix lointaines et des bruits de pas précipités, cela provient apparemment du couloir mais il discerne à peine dans la pénombre, l'espace d'un instant il imagine qu'ils sont peut-être en train de couler mais cette pensée est rapidement chassée de son esprit alcoolisé quand il aperçoit une silhouette menaçante dans les ombres de sa cabine, qui aussitôt se jette sur lui en brandissant une monstrueuse lame sombre. Son agresseur est un homme noir relativement jeune, vêtu d'un uniforme de garçon de cabine, son regard fou et son air enragé déstabilise O'Connor qui tente de se tenir le plus loin possible du garçon enragé armé de son terrible poignard, une lutte à mort s'engage entre le jeune noir et le détective. Au même moment Crane qui revient de la cabine de Washburne où un serpent a été découvert, frappe inquiet à la cabine du détective et entend les bruits de lutte à l'intérieur, en ouvrant la porte les deux protagonistes jaillissent de la cabine et s'écrasent violemment contre la paroi opposée du couloir toujours en train de lutter en poussant cris et jurons, Crane ne sachant quoi trop faire commence à hurler à l'aide en courant dans tous les sens. Washburne est en pleine discussion avec le capitaine lorsqu'il entend les appels au secours de Crane, il se précipite dans le couloir et aperçoit plus loin la lutte entre O'Connor et un inconnu armé, des passagers regardent interloqués la scène sans réagir, le sang ne fait qu'un tour dans les veines de Washburne qui se saisit d'une hache d'incendie après avoir brisé la vitre de protection, puis se précipitent vers son compagnon en détresse, bousculant les curieux à moitié réveillés qui se trouvent sur son chemin, puis d'un seul geste sans hésiter plante sa hache dans les côtes du jeune noir le stoppant net dans son élan, un flot de sang gicle sur Washburne et O'Connor, un hurlement à briser les tympans déchire le bref silence de stupeur et l'agresseur tombe à la renverse contre O'Connor, les témoins de la scène paniquent et se mettent à crier à leur tour.

Cette altercation sanglante donneront aux investigateurs du fil à tordre en explications compliqués avec le capitaine qui ne semble pas comprendre les tenants et aboutissants de cette histoire, il les prévient seulement qu'il est obligé de contacter les autorités britanniques par radio de ce qu'il s'est passé et qu'ils devront s'attendre à être interrogés par la police à leur arrivée. Le reste du voyage se passe sans incidents, malgré un retard conséquent de trois jours dû aux intempéries, pour le capitaine, qui a mené son enquête il n'a rien découvert à bord sur l'identité de l'agresseur, sans doute est-il monté clandestinement à bord explique t-il aux investigateurs, ses hommes ont juste découvert un panier en osier abandonné qu'il aurait utilisé pour transporter le serpent – un mamba noir selon un passager zoologiste – qui a été glissé dans la chambre de Washburne et ainsi que son arme que Washburne et O'Connor reconnaissent comme étant un Pranga, la même arme qui a tué Élias à New-York.

Le reste du voyage les investigateurs s'enferment dans leurs cabines en limitant leurs déplacements, un climat pesant s'abat sur leurs têtes rendant pénible la fin de la traversée, de toutes évidences ils doivent faire profil bas jusqu'à leur arrivée en Angleterre car des histoires sur leur compte commence à circuler parmi les passagers méfiants.

Welcome to England


les investigateurs arrivent enfin au port de Liverpool le 3 Février dans un froid quasi-hivernal, la police locale les attends de pied ferme sur le quai et les interrogent aussitôt à leur descente, seul Crane échappe à l'interrogatoire en ne descendant pas en même temps que Washburne et O'Connor, ce qui lui permet, à la demande de Washburne, de passer illégalement les armes à feu de ses compagnons. Cette tentative risquée passe tout de même par chance à la douane et Crane n'est pas inquiété, et c'est avec encore des sueurs froides lui collant dans le bas du dos que le journaliste attends ses compagnons dans un café du port. L'attente est longue car la douane n'est pas tendre avec Washburne et O'Connor qui fouille chacune de leurs bagages de fond en comble comme s'ils cherchaient quelque chose, il faut toute la patience et le crédit de Washburne pour arrondir les angles avec les fonctionnaires anglais trop regardants, malgré ça ils perdent de précieuses heures et prennent de justesse un train pour Londres en fin d'après-midi.


Le voyage dure 5 heures et se déroule sans ennuis pour les investigateurs qui se détendent un peu ou pour certains, continuent d'étudier leurs précieux mais maudits ouvrages, ils entrent en gare de Liverpool Station vers 22 heures et débarquent sur un quai quasi vide.



Les investigateurs cheminent vers la sortie avec les autres voyageurs, dans le grand hall de gare des kiosques à journaux accueillent les arrivants et affichent des nouvelles en tous genre mais l'une d'entre elle sollicite tout particulièrement leur attention : «Nouveaux meurtres égyptiens !»

Perplexes et s'interrogeant si cette nouvelle ne serait qu'une coïncidence avec ce qui les préoccupe, ils sont emportés par le flot tumultueux des autres voyageurs qui convergent bruyamment vers la sortie ou les attendent taxis, calèches et bus à impérial. Les investigateurs choisissent de prendre un taxi et demandent au chauffeur l'adresse d'un bon hôtel situé plutôt dans le centre-ville, après quelques propositions du chauffeur enjoué, ils optent pour le Sheraton Park Lane Hotel situé dans un quartier animé de Piccadily et à deux pas d'un nombre incalculables de pubs pour le plus grand plaisir de O'Connor.

Les investigateurs, se réchauffent autour d'une pinte de bière et de fish and chips, tout en décidant de leur programme du lendemain, ils iront tout d'abord voir ce journaliste, Mickey Mahoney, dont les locaux du Scoop se trouvent pas très loin de leur hôtel, puis ils rendront visite à l'inspecteur James Barrington et finiront par la Fondation Penhew pour obtenir un rendez-vous avec cet Edward Gavigan. Après leur copieux repas ils rejoignent leur hôtel pour une bonne nuit de sommeil.



Le 4 Février 1925 – Bureaux du Scoop.

Les bureaux du Scoop sont situés au 2ème étages d'un immeuble miteux de Fleet Street dans la City, le cœur de la presse londonienne. Après avoir gravit les marches branlantes de l'immeuble, les investigateurs pénètrent dans les locaux du tabloïd qui occupent une partie de l'étage, à l'accueil une secrétaire gouailleuse les dirige vers un couloir menant à un bureau. Ils sont accueillis par un rouquin débraillé, portant une belle moustache lustrée et mordillant un bout de cigare, de sa voix rocailleuse aux accents irlandais il demande aux investigateurs de s'asseoir et leur propose une tasse de bon whiskey avant même de leur demander ce qu'ils veulent. Le bureau est un véritable capharnaüm où même une chatte n'y retrouverait pas ses petits, les investigateurs prennent place comme ils le peuvent en trouvant un siège caché sous des tas de journaux ou papiers douteux, une fois installés et munis d'une tasse de tord-boyaux, ils exposent la raison de leur présence.

Mahoney est au courant de la mort d’Élias, une dépêche de presse lui a apprit la nouvelle il y a plusieurs jours et cela l'a attristé, il se montre totalement coopératif en racontant ce qu'il sait aux investigateurs. Élias est venu le voir en décembre 1924, se rappelle t-il, en lui promettant une histoire sur un culte londonien malfaisant, il insinuait que le culte pouvait avoir des relations hauts placés, comme le Scoop est friand d'histoires étranges et sanglantes voir avec des scandales sexuels, il lui a donné son feu vert et lui a ouvert ses archives où Élias à passé plusieurs journées. Mahoney se souvient que celui-ci semblait intéressé par deux histoires dont l'une concerne «les meurtres égyptiens», les investigateurs lui demande quelle était l'autre histoire qui intéressait Élias, l'irlandais fronce alors les sourcils et se lève subitement pour chercher dans son bureau l'article concerné et finit par brandir, au bout d'une bonne vingtaine de minutes de recherche dans un fatras de papiers entassés, un vieux journal comportant un article en troisième page.




Puis, à leur demande, sa secrétaire les conduire aux archives – un placard poussiéreux où s'entasse des amoncellements de cartons – où ils découvrent les divers articles concernant les «meurtres égyptiens» qu'aurait consulté Élias.

Ces articles sont anonymes remarque Crane, Mahoney indique légèrement embarrassé devant la remarque de l'investigateur, que lui ou un de ses collaborateurs ont très bien pu les réécrire à partir de dépêches d'agence pour leur donner un peu plus de punch, crache t-il cyniquement en mordillant son bout de cigare. Les investigateurs lui demandent s'il connaît l'inspecteur Barrington, le journaliste rétorque que c'est le flic chargé de l'affaire «des meurtres égyptiens» depuis bientôt un an et que Élias l'avait aussi interrogé, le prédécesseur de cet inspecteur sur l'affaire, dont il a oublié le nom, à brusquement disparut sans laisser de traces et depuis Barrington semble obsédé par cette enquête et en faire une affaire personnelle.

Mahoney n'a jamais eu, finalement, son histoire ni aucun détail sur les soupçons qu'avaient à ce sujet Élias, il ne sait pas si celui-ci a suivi une de ces pistes. La dernière fois qu'il l'a vu il semblait désespéré, aux abois et reparti rapidement pour New-York sans prévenir.

Avant que les investigateurs ne repartent avec ces pistes en poche, Mahoney leur dit qu'il serait éventuellement intéressé par leur histoire et leur offre jusqu'à 15 £ pour un bon article, Crane semble d'accord et prend bonne note de ce providentiel emploi, Mahoney lui glisse sa carte dans sa poche et rajoute que si ils ont besoin de quoi que ce soit il connaît du monde en ville, ce qui pourrait être utile à des yankees comme eux.

Après leur visite au Scoop, les investigateurs prennent un taxi direction New Scotland Yard à la rencontre de l'inspecteur James Barrington et lui poser à son tour des questions sur Élias Jackson.

New Scotland Yard


le taxi dépose les investigateurs au 8-10 Broadway dans Westminster devant l'entrée du quartier général de la Metropolitan Police Service où deux bobbies à l'air sévère gardent l'entrée. Ils pénètrent dans le hall et demandent à rencontrer l'inspecteur Barrington à l'accueil, quelques instants plus tard ils se retrouvent dans un vaste couloir faisant face à des bureaux où dans l'un d'entre eux ils aperçoivent la silhouette de l'inspecteur à travers la vitre dépolie de la porte.

Ils sont finalement reçus par l'inspecteur, un homme grand et guindé, plutôt chic dans son costume sur mesure, mais au visage sévère et fermé, il jette un rapide coup d’œil sur sa montre à gousset quand les investigateurs entrent dans son bureau. L'endroit est comme l'homme, ordonné et froid, quand l'inspecteur demande aux investigateurs de s'asseoir, il n'y a que deux chaises devant son bureau, obligeant Crane à rester debout ce qui lui permet d'arpenter le bureau en regardant les quelques photos et diplômes accrochés aux murs froids. Washburne se présente ainsi que ses compagnons et expose la raison de leur présence, il lui parle alors de Jackson Élias et de leur enquête au sujet de sa mort et des liens de cette affaire avec un culte secret africain établi à New York, il explique que leur enquête les a menés jusqu'à Londres en remontant les pistes d’Élias et que celles-ci les ont menés jusqu’à lui, de plus rajoute Washburne, il semblerait que lui-même, James Barrington, enquête sur des meurtres «en série» comme eux à New York et fait allusion à peut être à une coïncidence. O'Connor se penche sur le bureau de l'inspecteur et lui propose même d'appeler l'inspecteur Martin Poole à New-York pour vérifier leurs dires et se renseigner à Liverpool auprès de la police au sujet d'une attaque qu'ils ont subis sur le paquebot qui les conduisait en Angleterre.

À la fin de leur exposé, l'inspecteur Barrington soulève un sourcil troublé, joins ses mains devant sa bouche tout en regardant chacun des investigateurs, il leur explique que dans le cadre d'une enquête officielle il ne peut pas partager toutes ses informations avec les investigateurs néanmoins il leur apprend qu'il a effectivement rencontré Élias Jackson et qu'ils ont parlés des meurtres et que pour lui ils étaient l’œuvre par la Fraternité du Pharaon Noir, un culte égyptien de la mort ; sceptique par les déclarations du journaliste américain, il a interrogé par la suite Edward Gavigan un éminent spécialiste en égyptologie de la Fondation Penhew à Londres, mais ce dernier affirme que ce culte n'existe plus depuis longtemps et que le protocole des meurtres – victimes battues et poignardée au cœur – ne lui correspond en rien, Barrington en a déduit à la suite de cette entrevue que monsieur Élias ne cherchait qu'à faire sensation. Quand on lui demande pourquoi ces meurtres ont étés qualifiés «d'égyptiens», il explique qu'ils ont étés baptisés ainsi par la presse en référence aux origines égyptiennes de 17 des victimes, auparavant explique t-il après s'être levé et posté devant la fenêtre de son bureau, c'était l'inspecteur Léon Corkins – un ami à lui avec qui il était à l'université qui était en charge de l'enquête et que celui-ci a subitement disparut sans laisser de trace, d'après l'inspecteur il est sûr que le pauvre bougre a été assassiné et qu'il tient à élucider l'affaire le plus rapidement possible. Les investigateurs insistent pour qu'il leur communiquent plus d'informations afin de s'aider mutuellement, l'inspecteur hésite en expliquant qu'il ne peux pas se permettre d'impliquer des civils – et des étrangers par-dessus le marché – dans l'enquête et que tout zèle ne saurait excuser l'illégalité, cependant il leur parle du Club de la Pyramide Bleue dans l'East End qui fut une piste un temps, un lieu apprécié des noctambules égyptiens et dont la majorité des victimes le fréquentaient, mais les surveillances policières non rien donné. Pour conclure leur entretien avec les investigateurs, l'inspecteur leur explique qu'une des victimes aurait crié «Hotep» avant de mourir d'après un témoin interrogé, il a demandé à Edward Gavigan ce que cela pouvait bien signifier et celui-ci lui a dit qu'il s'agissait d'un antique mot égyptien signifiant «repos» ou «paix».

La Fondation Penhew


Ensuite, après s’être arrêtés pour déguster un "Steak & Kidney Pie" (un pâté en croûte chaud, au bœuf et aux rognons, dans une sauce de viande épaisse, avec pommes de terre et légumes, So british!) le tout arrosé d'une pinte de bière, les investigateurs se rendent au sud de Londres dans Lambeth en bordure de la Tamise où se trouve la Fondation Penhew, juste en face de la gigantesque Maison du Parlement.

Devant eux se dresse un bâtiment sur un étage et de style victorien entouré d'une grille en fer forgé, qui se distingue de ses voisins par son élégance et sa recherche, de part et d'autres de l'entrée se dressent deux massifs sphinx en bronze faisant office de gardiens impassibles, un homme en livrée de chasseur leur ouvre la porte tout en les saluant de son haute-forme. L'intérieur est d'une décoration opulente avec de nombreux bibelots sur le thème de l’Égypte antique, ils sont accueillis à leur entrée par un secrétaire souriant dans un costume impeccable, les investigateurs demandent s'ils peuvent êtres reçus par monsieur Edward Gavigan et l'homme leur demande de patienter pendant qu'il va prévenir le conservateur. Les investigateurs remarquent qu'il y a de nombreuses allers et venues dans le bâtiment, des étudiants ou des professeurs en général venus se documenter, finalement le secrétaire revient vers eux rapidement et les conduits à une salle d'attente en leur disant que monsieur Gavigan va les recevoir dans quelques instants.

Quelques minutes plus tard ils se retrouvent dans le luxueux bureau lambrissé de Edward Gavigan, qui les accueille sans aucune réserve tout en leur souriant chaleureusement. Gavigan est un homme grand, sophistiqué et tiré à quatre épingles, portant un magnifique costume taillé sur mesure, pendant qu'il les faits s'asseoir O'Connor remarque du coin de l’œil un coffre fort dans un coin de la pièce derrière le bureau, il est entrouvert et laisse entre-apercevoir plusieurs liasses de billets de 5£.

À la question des investigateurs Gavigan confirme que M. Élias est bien venu lui parler et se montre affligé par la nouvelle de sa mort même s'il ne l'a rencontré qu'une fois, celui-ci l'a questionné au sujet de la participation de Sir Aubrey Penhew à l'expédition Carlyle si ses souvenirs sont exacts, il semble réfléchir quelques secondes puis explique ce qu'à l'époque il avait dit à Élias sur ce qu'il sait sur l'expédition. Carlyle avait obtenu des renseignements – par l'intermédiaire d'une mystérieuse Africaine apparemment – sur une époque obscure de l'histoire égyptienne ce qui intéressa beaucoup Sir Aubrey, cela concernait un sorcier à une époque obscure de l’Égypte antique qui avait régné sur la Vallée du Nil. Hélas, soupire Gavigan, toute l'histoire n'était qu'une escroquerie, une fois en Égypte, la jeune femme a disparu avec les fonds de l'expédition, peut-être 3500 £ anglaises. Avec un air conspirateur, il rajoute qu'entre hommes du monde, je crois pouvoir dire que si Carlyle n'a pas regretté une seconde la perte d'argent, il s'est montré très affecté par la trahison de sa maîtresse, ainsi craignant que la chaleur et la déception égyptienne n'affectent gravement l'état de santé de son ami, et le sien, c'est Hypathia Masters qui avait suggéré que le groupe passe le mois d'été sur les hauts plateaux relativement tempérés du Kenya. Gavigan se lève alors doucement de son bureau et se dirige d'un pas feutré vers un petit présentoir en verre où trône des petites statuettes égyptiennes et prend un air grave en les fixant, il soupire à nouveau puis il reprend, là-bas ils se sont égarés en territoire dangereux, une erreur qu'ils ont payée de leur vie. Gavigan se retourne vers les investigateurs avec un sourire triste puis continue, l'essentiel des archives de l'expédition a été perdu aussi, Sir Aubrey les avait emporté avec lui pour travailler sans attendre, pendant que ces souvenirs des fouilles étaient encore frais, c'est une grande perte pour la fondation rajoute t-il, mais le positif dans tous ça c'est que l'expédition a mis à jour malgré tout divers artefacts intéressants, un bon nombre d'excavations exploratoires ont étés réalisés en prévision d'une étude systématique du site de Dashûr par Sir Aubrey et même certains sites secondaires ont aussi étés découverts dans le désert, à l'ouest de la pyramide de Gizeh. Le gouvernement égyptien a prêté plusieurs artefacts récoltés au British Museum et autoriser l'achat de certaines pièces moins importantes pour la Fondation Penhew, un juste retour des choses après cette horrible tragédie. La plupart des découvertes sont toujours en cours de catalogage au musée égyptien du Caire, mais Gavigan propose volontiers aux investigateurs les moindres merveilles ramenées en Angleterre si ceux-ci sont intéressés, les investigateurs acceptent et Gavigan leur propose de l'accompagner dans la salle d'exposition à l'étage.


La salle d'exposition est une grande pièce lumineuse flanquée de salles d'études et de salles de rangement de certaines collection, au milieu trône un vaste hall ou sont exposés quelques pièces sous l’œil vigilant de deux gardiens. Gavigan conduit alors ses invités à travers une infinité de tessons ciselés, de poteries brisées, statues de chats et dames en tenues légère, il profite pour leur montrer les salles d'études et de rangement où il leur montre les découvertes de feu Sir Aubrey, il en profite pour les présenter à certains membres du personnel et étudiants, avec certains d'entre eux ils prennent le thé pendant qu'on leur parle d'égyptologie, la visite s'éternise jusqu'en fin de journée et s'est avec une poignée de main chaleureuse que les investigateurs quittent la Fondation et gavigan, la nuit est tombée tandis qu'un taxi – appelé par les soins de la Fondation – les attends en faisant ronronner son moteur.



À suivre...